Pour Rémi

"Tu dramatises toujours tout, lundi on se voit et on en reparle

- Lundi il sera trop tard

-Mais non, on se voit lundi"

Depuis il y a eu des lundi qui se sont passés, et on ne s'est jamais revu. Elle a mis fin à ses jours le samedi soir, et tous les lundi sont devenus des rendez-vous manqués. Je me souviens des graviers du cimetière, de cette tombe trop étroite pou accueillir notre chagrin, du monument aux morts planté triomphant au centre et du platane qui nous regardaient passer la tête basse, rongés de remords. J'y suis allé plusieurs fois , en douce, puis le temps a espacé mes visites, puis le temps a fait qu'aujourd'hui, je serais plus reconnaître l'emplacement de la tombe.

Cela fait combien ? de 1987 à nos jours ? Cela fait toujours trop. Et nos vies à tous ont basculé. Il y a eu ce chaos , tout de suite après avec toutes ces questions restées sans réponses, et cette léthargie, ce chagrin si puissant qui nous a rongé jusqu'à l'os. Et ce sentiment d'infinie solitude face à la mort, face à l'absurdité, face au manque d'amour.

Rémi, depuis des lundi et des lundi, j'ai parcouru des routes, pas toujours droites, pas toujours belles, sinueuses dans mon âme, dans mon coeur, tout ce qu'il me reste c'est une photo, soigneusement conservée dans un classeur., et cette phrase : "lundi il sera trop tard"

Tiens bon Rémi, il n'y a pas de remède miracle, mais l'affection des proches, la caleur des amis, pansent les plaies, apaisent .

L'amour et le temps sont des baumes.