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8 mars 2013 5 08 /03 /mars /2013 11:38

P1100036 papate sillon copie(2)

Approche-toi et écoute-moi.

Désormais les hommes ont appris à parler à leurs fils.

Moi tout ce que je sais, ce sont les regards et les silences de mon père, ton grand-père, qui me l'ont appris.

Le Sillon te rappelle que tu n'es qu'une parenthèse dans l'immensité, tu n'es qu'un minuscule chemin entre deux étendues d'eau.

Les galets rendent ta direction incertaine et chaotique.

Le Sillon te rend humble, il t'oblige.

Nous autres du Sillon sommes peu bavards.

Les éléments nous imposent le silence, ils ont toujours le dernier mot.

Tu sauras très vite que tu n'es pas ce que tu possèdes, ce que tu sais et ce que tu fais.

Mais comment tu possèdes , comment tu sais et pourquoi tu fais.

Nous ne montons pas de hauts mûrs autours de nos maisons.

Nous offrons à la vue de tous notre simplicité.

Notre seule richesse est notre granit.

Partagé par tous, nous sommes reliés par les éclats de lumières prisonnières de la roche.

Nous ne sommes pas propriétaires de la terre, nous sommes la terre.

Nous ne sommes pas propriétaires de la mer, nous sommes son eau.

Ce sont les marées qui rythment nos vies.

Elles déplacent et façonnent le Sillon , rien n'est figé.

C'est pour cela que nous savons depuis toujours que c'est la nature qui impose sa loi, sa vérité.

Elle seule agit, nous, nous ne sommes que réaction.

Nos corps attachés à la terre sont lourds, pesants.

Nos cœurs amoureux de la mer, sont légers et généreux, nous n'avons pas le choix.

C'est l'immensité de la mer qui nous pousse à la pudeur.

Notre intimité est notre refuge.

A force de vivre dans la nature, nous savons que rien ne dure et que nous devons rendre ce qu'elle nous a donné.

C'est pour cela que la mort n'est pas vécu comme une injustice mais comme une reconnaissance.

Seule la douleur de l’absence nous est permise.

N'oublies jamais que tu es redevable à la communauté des hommes, tu profites du travail des générations précédentes.

N'oublies jamais que tu es redevable au Sillon, il a nourries ton imaginaire et fabriqué ton caractère, crée ton identité.

Loin du Sillon tu vivras avec un manque.

Tu devras te faire à une perte d'une partie de toi.

Le bas du ventre , juste sous ton nombril, dessine ton cordon ombilical.

C'est le Sillon qui est le cordon de la terre dans la mer.

Les galets serpentent dans l'eau.

L'eau charme le serpent.

Promets-moi qu'à ma mort, tu viendras sur le Sillon.

Tu enlèveras une pierre et le courant de la mer en sera détourné.

J'emporterais avec moi ce qui a été.

Depuis que les hommes savent parler à leurs fils...

 

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